Portrait Mme Mariama Rabiou dite Mamie : La cantatrice à la voix d’or

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1944
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Au temps du festival national de la jeunesse, la troupe de ballet de Gaya avait, à maintes reprises, ravi la vedette aux autres troupes. Des longues années durant, les amateurs de la culture se souviennent encore du passé glorieux de la troupe culturelle de Gaya à travers ses productions riches et variées en chansons, ballets et théâtres.
Le département de Gaya a incontestablement joué un rôle prépondérant dans la sauvegarde et la pérennisation des valeurs sociales et culturelles. En effet, si la troupe culturelle de Gaya a fait vibrer le public au cours des grandes manifestations culturelles, c’est parce que derrière cette troupe, il y a des hommes et des femmes qui ont fait de la culture leur passion. On ne peut évoquer le prestige du ballet de Gaya sans parler de cette cantatrice à la voix d’or en la personne de Mariama Rabiou, plus connue sous le nom de Mamie.

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Mamie avait intégré la troupe au temps du Feu Chef de l’Etat, le Général Seyni Kountché, et elle a abandonné sa carrière d’artiste, aussitôt après son décès. Cantatrice émérite, elle a décroché plusieurs trophées avec la troupe culturelle de Gaya qu’elle a soutenue et défendue pendant des années. Les différentes chansons qui ont permis à la troupe de se classer parmi les meilleures productions artistiques sont entre autres,  »Lama Bangou »,  »Maï fila-fili » ;  »Namardé say kossom balli » produit en 1982,  »Dembé karfé » en 1984 etc. Mamie a été encadrée par le chef de la troupe M. Abdoulaye Bagoudou dit Telaïzé. Elle avait le don de comprendre et d’assimiler aisément, et a toujours été à la hauteur des attentes du groupe. Tout le groupe était fier de travailler et collaborer avec elle, à cause de sa simplicité et de son dévouement au travail, comme le témoigne M. Maman Dossakoye, un ancien danseur de la troupe.
Mamie se rappelle encore du chemin parcouru par la troupe avant de se faire une place au sein de plusieurs groupes venus de diverses localités du pays.  »Je me rappelle que quand nous partions au festival de Niamey où nous avons présenté  »Dembé karfé » en 1984, nous avons fait deux (2) accidents en cours de route. Mais malgré tout, nous avons gardé notre courage et nous sommes montés sur scène. Si vous avez constaté, dans ce ballet, j’avais la main gauche immobilisée. J’étais blessée, mais malgré cette blessure, je me suis produite », a-t-elle affirmé.
Sur un tout plan, retenons que la troupe de Gaya a hissé le nom du Niger au plan culturel aux niveaux régional et international. Mme Mariama Rabiou et ses collègues de la troupe ont d’abord sillonné presque tout le Niger, avant de visiter certains pays africains comme l’Algérie, la Tunisie, le Bénin, le Nigeria, le Maroc, la Libye. Concernant l’Europe, ils ont visité la France et l’Italie. Partout où ils se sont rendus, ils se sont comportés en dignes fils du pays et exposé toutes les diversités et les richesses culturelles du Niger. A 50 ans, mariée et mère de deux (2) enfants, Mamie est susceptible de partager avec la jeunesse toutes les chansons qu’elle a apprises de son jeune âge. Aujourd’hui, ce qu’elle regrette de toute sa carrière artistique, c’est que les artistes soient vite oubliés une fois à la retraite. Ils sont peu concertés et rarement sollicités afin d’apporter leur concours au rayonnement des valeurs culturelles dont regorge notre pays. Avec plus de dix (10) chansons à son actif, elle déplore de n’avoir jamais bénéficié de droit d’auteur. Or, il est connu de tous que toutes les chansons de la troupe de Gaya sont surexploitées, tantôt par la jeune génération d’artistes, tantôt par les médias.  »Je suis à Gaya, oubliée par le Ministère de la Culture, par ma région, et d’autres profitent de nos œuvres. Il y a de cela un peu moins de quatre (4) ans, si j’ai une bonne mémoire, la cantatrice Habsou Garba m’a informé de l’existence du Bureau National des Droits d’Auteur (BNDA). Elle m’a, à cet effet, proposé de venir à Niamey pour qu’elle me présente au niveau de ce bureau. Elle m’a informé parce qu’elle savait comment nos œuvres sont aujourd’hui utilisées. Et elle a agi ainsi au nom de la solidarité corporatiste », a-t-elle confié. Quelques jours après, Mamie s’est rendue à Niamey. Elle y était restée pendant trois jours, chez Habsou Garba qui a très bien pris soin d’elle. Durant son séjour à Niamey, elle s’est présentée au BNDA où elle a fait part de l’objet de sa visite.  »Le responsable que j’ai trouvé m’a demandé de formuler un dossier. J’ai fait le dossier et il m’a encore redemandé si je peux chanter toutes les chansons que j’ai pu produire. J’ai chanté sur place quelques unes. Après, j’ai produit une cassette contenant toutes mes chansons et que j’ai déposée. Il m’a demandé de rentrer, et qu’ils vont me rappeler. Depuis lors, je n’ai aucune nouvelle. Toutes mes démarches étaient restées vaines. Vous comprenez maintenant ma déception. Chaque fois, je reçois des journalistes qui viennent me faire des interviews. Je suis déçue de l’attitude et du comportement de nos responsables culturels vis-à-vis des artistes », a confié Mme Mariama.
Prête à partager et transmettre ses connaissances à la jeune génération, elle a précisé que cette jeunesse ne pense pas à elle, elle ignore sa présence dans la ville. Par ailleurs, elle n’a pas formé ses enfants, parce qu’elle sait que les artistes, de manière générale, sont sollicités pour les nécessités du présent. Malgré tout ce qu’elle a fait pour le rayonnement de la culture nigérienne, Mamie ne bénéficie d’aucun soutien des autorités locales, régionales ou du Ministère de la Culture.  » Avec un tel mépris et désengagement, je ne vois pas un avenir radieux pour la culture au Niger si les choses ne changent pas »- dit-elle avec amertume.
Laouali Souleymane, envoyé spécial

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