Mémorandum : le comité de veille Régional de Diffa déplore l’affaiblissement dispositif sécuritaire dans la région

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Le 12 Juillet 2020 le comité de veille Régional de Diffa s’est réuni en Assemblée Générale en vue d’analyser la situation socioéconomique, humanitaire et sécuritaire  de la région de Diffa. 

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Ainsi, au terme d’une journée d’intenses débats et de discussions autour des situations sécuritaires économiques et humanitaires, l’Assemblée Générale rend le mémorandum dont la teneur suit :

De la situation sécuritaire

Tout d’abord, il faut reconnaitre que la mesure de l’état d’urgence instaurée depuis le 06 février 2015 dans le but de maitriser la situation sécuritaire n’a pas effectivement produit les résultats escomptés. Au contraire cette mesure n’a fait qu’aggraver la situation économique déjà précaire des populations durement affectées par les inondations et le chômage endémique.

Malgré les efforts fournis par les FDS présentes dans la région de Diffa nous  constatons que la situation sécuritaire demeure toujours inquiétante au vu des attaques récentes sur le poste militaire de Blabirin, de Toumour et les attaques répétitives sur le pont Douchi. Quant aux enlèvements de personnes, c’est devenu pratiquement le quotidien des populations de la région puisqu’aucune nuit ne se passe sans qu’une personne ne soit enlevée. A l’approche de la tombée de la nuit les populations sont gagnées par la peur et le doute parce que abandonnées à elles-mêmes. C’est ainsi que dans l’espoir d’échapper à ces groupes armées non étatiques, les populations quittent leurs villages et passent la nuit en brousse exposées à toutes les intempéries. Et cela se passe dans un silence déconcertant de toutes les autorités à tous les niveaux. Ce désintéressement se manifeste par l’absence de communiqué officiel de condamnation, d’indignation ou de compassion, à fortiori de soutien aux populations de Diffa qui subissent de façon stoïque et avec dignité cette situation depuis cinq ans.

Il faut noter également que les otages  sont libérés contre paiement des rançons versées  aux ravisseurs par les parents amis et connaissances qui vendent les derniers biens qui leur restent.

De la situation économique

Elle est caractérisée par une asphyxie du tissu économique de la région : destruction complète de tous les secteurs de production (agriculture sur le lit du lac Tchad et de la komadougou, de l’élevage, de la pêche, du commerce, etc.). 

En effet, depuis un peu plus de cinq ans la population de la région  assiste impuissamment à sa paupérisation dûe à la désagrégation complète du tissu économique et social engendrée par  les déplacements massifs de populations, l’inaccessibilité du lit du lac Tchad du fait de son occupation par les éléments de boko haram, l’inaccessibilité aux rives de la komadougou pour la culture principalement du poivron et du riz ainsi que pour la pêche et l’élevage. A cela il faut ajouter les difficultés d’accès aux intrants agricoles malgré la levée de l’interdiction par les autorités. .il faut également rappeler la campagne agro-pastorale déficitaire dans certaines zones de la région et les inondations qui ont occasionné d’importants dégâts sur les cultures irriguées en particulier le riz et le poivron. Ces populations restent aujourd’hui complément démunies et dépendent  uniquement de l’aide humanitaire. 

A cette situation sans précédent dans l’histoire de la région vient s’ajouter une pression fiscale  sans commune mesure exercée sur les populations de la région de Diffa, en particulier sur les commerçants. En effet, les impôts, les taxes et  tarifs douaniers   sont venus agenouiller  les quelques rares commerçants de la région de  Diffa qui continuent  de résister au poids de mesures de l’état d’urgence. 

De la situation agro-silvo pastorale

La mauvaise campagne agricole et pastorale et les inondations sur les cultures de riz et de poivron ont emporté le seul espoir qui restait à ces populations qui ne savent plus à quel saint se vouer. Aujourd’hui, les populations comptent et vivent uniquement de l’aide humanitaire. Cette aide apportée par l’Etat et ses partenaires est  loin de couvrir les besoins alimentaires de la population. Les promesses des autorités de soutenir les populations victimes d’inondations par une aide d’urgence de l’Etat et celle à moyen terme des partenaires n’ont jusqu’ici pas été intégralement honorées. La population de la région de Diffa est actuellement exposée à une grave crise alimentaire et même à la famine.

De la situation des droits de l’homme et des libertés

Depuis l’instauration de l’Etat d’urgence en février 2015, qui est lui-même une mesure liberticide, la région de Diffa a connu plusieurs cas de violation des droits de l’homme : arrestations arbitraires, tortures, traitements inhumains et dégradants, destructions des biens, exécutions extra judicaire, restrictions des libertés de manifestations, d’expression, limitation des droits d’aller et venir, etc.

Enfin le comité de veille fustige 

1. l’importation des travailleurs des autres régions par les ONG, projets et institutions nationales intervenant dans la région pour des postes qui ne nécessitent même pas des qualifications particulières notamment les postes de chauffeur, d’agent de sécurité  ou de gardien;

2. Condamne l’abandon du poste militaire de Blabirin à la frontière avec le Tchad;

3. Déplore l’affaiblissement dispositif  sécuritaire dans la région de Diffa puisque sur les 22 postes militaires qui existaient dans la région en 2015, il n’existe pratiquement que quatre aujourd’hui;

Au vu de tout ce qui précède le comité de veille exige de l’Etat ce qui suit :  

• Procéder à l’assouplissement de l’état d’urgence ainsi que toutes les autres mesures restrictives liées à l’état d’urgence;

• Alléger les mesures de couvre-feu en vigueur notamment les horaires de couvre feu dans la région de Diffa;

• Renforcer les mesures sécuritaires dans la région de Diffa notamment par le retour de certaines positions militaires dans la partie sud de la région afin de protéger les populations et leurs biens;

• Revoir la nouvelle stratégie militaire des forces de défense et de sécurité consistant à la mobilité de ces forces, ce qui ne rassurent pas la population qui  l’impression d’être abandonnée à la tombée de la nuit;

• La reprise des travaux de bitumage de la route Diffa-N’guigmi- frontière Tchad pour permettre la création d’emplois aux jeunes et le désenclavement de la ville de N’guigmi qui  étouffe économiquement du fait de l’arrêt des travaux de cette route ;

• Favoriser les agences de location de véhicules de la région pour les prestations de location de véhicules auprès des ONG et Projets intervenants dans la région;

• Réalisation du butimage du tronçon Mainé-Gaidam (7km);

• Rendre effective le retour  des représentations des compagnies pétrolières à Diffa conformément aux instructions du ministre du pétrole en réponse à la demande du gouverneur et des populations ; 

• Trouver des perspectives d’intégration économique des jeunes par la création d’emploi aux jeunes désœuvrés de la région;

• Alléger la pression fiscale exercée sur les populations en général et les transporteurs et commerçants en particulier pour faciliter l’augmentation du pouvoir d’achat;

• Accorder des exonérations sur les  produits de première nécessité compte tenu des difficultés économiques que vit la région de Diffa ;

• Supprimer certains contrôles routiers afin d’alléger les tracasseries routières;

• Lever les barricades qui bloquent les grandes artères des villes de Diffa et N’guigmi afin de rendre  la circulation urbaine fluide;

• Eviter de transporter des employés des ONG et projets surtout pour les postes dont les compétences sont disponibles sur place:

• L’électrification des départements de Ngourti et Nguigmi à partir d’Agadem;

• Résoudre le problème d’électrification du département de Bosso;

• La réduction des frais de consultation et d’examen médicaux dans les centres hospitaliers de la région;

En cas de non satisfaction, le comité de veille  se donnera tous les moyens légaux en vue de faire aboutir ses justes et légitimes revendications. Et  le comité tiendra l’Etat et seul l’Etat pour responsable de tout ce qui adviendra.

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