Politique

Niger : l’opposition fustige ce qu’elle appelle « la mafia rose »

Réunie ce jour mercredi 29 février 2012 à l’effet d’examiner la situation socio politique du pays, l’Alliance pour la Réconciliation Nationale(ARN) rend publique la déclaration dont la teneur suit:

Depuis l’installation des autorités de la 7ème République, les Nigériens ont assisté à ce qu’il est convenu d’appeler désormais « la sacralisation de la violation de la Constitution ». On se rappelle que dès sa prestation de serment le 07 avril 2011, le premier acte posé par le Président de la République a été d’ordre anti constitutionnel. Il s’agit de la nomination de son Premier Ministre et ce, avant qu’aucun acte formel ne vienne consacrer sa majorité conformément à l’esprit de la Constitution.

Ce premier cadeau anticonstitutionnel offert par le Président de la République au Peuple nigérien, annonçait le début d’une série de violations de la Constitution et ce, par les trois Responsables de la Majorité, à savoir le Président de la République, le Président de l’Assemblée Nationale et Le Premier Ministre.

Mais le summum va être atteint avec cette affaire de marché public impliquant Oumarou Mainassara, opérateur économique, député national de son état au titre du Parti politique PNDS Tarraya ainsi que le Ministre de l’équipement Kalla Hankouraou et celui des Finances Ouhoumoudou Mahamoudou tous Ministres au titre du Parti PNDS Tarraya.

Face à cette flagrante nouvelle violation, l’Alliance pour la Réconciliation Nationale, fidèle à ses principes de respect de la loi fondamentale et de l’Etat de droit a, pour clarifier cette situation, saisit pour une première fois le Conseil Constitutionnel de Transition pour donner un avis sur l’article 52. Et suite à cet avis, l’ARN saisit une deuxième fois le Conseil Constitutionnel de Transition pour rendre un Arrêt à fin d’application de l’avis. Cet Arrêt sera rendu le 15 février 2012 et stipule que :

« Le Député Amadou Oumarou Mainassara n’a pas respecté l’interdiction posée par l’article 52 de la Constitution ;

« Le Ministre signataire des contrats a méconnu les dispositions de l’article 39 de la Constitution ».

Mais voilà, qu’au lieu de tirer les conséquences de cet Arrêt, le pouvoir, à travers ses journaux, va banaliser les décisions du Conseil Constitutionnel de Transition par un jeu de mots caractéristique d’une mauvaise foi, valeur intrinsèque de ce régime.

Fort heureusement, le Conseil Constitutionnel de Transition dans un communiqué de presse en date du 22 février 2012 précise sans ambages que « le non respect tout comme la méconnaissance des dispositions constitutionnels signifient purement et simplement leur violation »

En d’autres termes que le Député en question et les Ministres concernés ont violé la Constitution.

Malgré cette clarification du Conseil Constitutionnel de Transition, plus d’une semaine après, le Président de la République et le Premier Ministre Chef du Gouvernement qui ont prêté serment de respecter et de faire respecter la Constitution observent de manière complice un silence de mort, démontrant une indifférence totale et un mépris provocateur à l’égard de cette décision de la plus Haute Juridiction et à l’égard du peuple nigérien.

L’ARN, tout en se félicitant que le droit ait été dit,  estime que la portée de la décision du Conseil Constitutionnel de Transition se situe au triple niveau: juridique, politique et international.

a) Au plan juridique :

L’ARN rappelle au Président de la République que l’Autorité des décisions du Conseil Constitutionnel de Transition est consacrée par notre loi fondamentale.

En effet, l’article 134, alinéa 1er de la Constitution du 25 novembre 2010 dispose que:      «  Les Arrêts de la Cour Constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours. Ils lient les pouvoirs publics et toutes les Autorités administratives, civiles, militaires et juridictionnelles».  C’est dire qu’on distingue ici, d’une part, l’Autorité « obligatoire » de la chose jugée qui s’attache aux décisions rendues par le Conseil Constitutionnel de Transition qui impose leur exécution immédiate par les pouvoirs publics, et d’autre part, l’Autorité  « persuasive » ou  « morale » bien que non écrite, qui peut être accordée de façon générale à la « chose jugée ou interprétée » par le Conseil Constitutionnel de Transition , c’est-à-dire la « jurisprudence » ou la doctrine, en général.

Alors, qu’attendent le Président de la République et le Chef du Gouvernement pour faire respecter la décision du Conseil Constitutionnel de Transition ?

L’ARN estime que, le Président de la République qui a juré sur le saint coran, de respecter et de faire respecter la Constitution (article 50 de la Constitution) et le Premier Ministre, Chef du Gouvernement qui a aussi juré sur le saint coran de respecter la Constitution (article 74 de la Constitution)doivent tirer toutes les conséquences qui découlent de l’Arrêt N°05/12/CCT/MC du 15 février 2012.

L’ARN rappelle au Président de la République que le refus d’obtempérer à un Arrêt de la Cour Constitutionnelle est passible de haute trahison (article 142) de la Constitution.

Pour l’ARN, d’ores et déjà, des mesures immédiates s’imposent au Gouvernement au nombre desquelles:

 Le remboursement intégral au Trésor public des milliards ainsi indument perçus au titre d’avance

b) Au plan politique

L’ARN réaffirme, que le Président de la République, garant de la Constitution, a failli.

En effet, le Conseil de Ministres présidé par le Président de la République en personne a été informé de l’attribution des marchés et les a entérinés, d’autant que l’article 2 de l’arrêté N°0001 ME/F/SG/DGC du 12 janvier 2011 dispose que « tout marché public dont le montant est égal ou supérieur à 500. 000. 000 de francs CFA doit faire l’objet d’une communication de la structure responsable du marché en Conseil des Ministres après attribution. Cette communication est faite à titre d’information. L’attribution du marché reste sous la responsabilité du maitre d’ouvrage. »

En outre, l’Arrêt du Conseil Constitutionnel mettant en cause les Ministres concernés a été rendu depuis le 15 février 2012, notifié au Gouvernement et rendu public dans tous les médias. C’est dire que tous les citoyens, au premier rang desquels le Président de la République, sont informés de cet arrêt.

Pourtant, les Ministres concernés continuent à agir impunément au nom de la République.

L’ARN s’interroge sur l’appréciation que les Ministres concernés font de leurs responsabilités morale et politique et ainsi que de la portée juridique des actes posés par ces derniers depuis le 15 février 2012 ?

A partir de quand peut on considérer qu’il y a refus d’obtempérer ?

c) Au plan de la Coopération internationale

Tout en remerciant nos Partenaires au Développement, en l’occurrence l’Union Européenne pour leur apport précieux au développement de notre pays, l’ARN déplore que les fonds alloués par ces partenaires soient injustement utilisés à des fins de financement de certains partis politiques. En effet, avec ce dossier, faut –il le rappeler, c’est toute une chaine composée des personnes du même parti politique – le PNDS Tarraya  à savoir le Député bénéficiaire des marchés, le Directeur Général des grands travaux, le Contrôleur Financier, le Directeur Général du Contrôle des Marchés Publics, le Ministre de l’Equipement en tant que Maître d’ouvrage, le Ministre des Finances en tant  qu’ordonnateur national, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement et le Président de la République, Président du Conseil des Ministres qui sont de connivence dans cette affaire. En réalité, nous sommes en présence d’une véritable mafia rose.

C’est pourquoi, l’ARN demande aux partenaires techniques et financiers d’exiger des Autorités actuelles dont les pratiques jurent avec la bonne gouvernance, la mise en œuvre de conditions de transparence et d’équité dans l’octroi des marchés publics qu’ils financent.

Au regard de tout ce qui précède, l’ARN :

informe l’opinion nationale et internationale qu’elle usera de tous les moyens de droit afin de faire appliquer les conséquences  administratives, juridiques et politiques découlant de ces violations répétées de la Constitution ;

Vive le Niger,

Vive l’ARN,

Vive la démocratie.

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