La situation sécuritaire s’est dégradée ces dix dernières années au Nigeria, du fait des activités du groupe terroriste Boko Haram qui sévit dans le nord-Est du pays. L’enjeu sécuritaire a d’ailleurs été le principal sujet de préoccupation des populations nigérianes, voire de celles du Bassin du Lac Tchad.
Au plan social, la situation d’insécurité a été le sujet qui a dominé les débats. Et la lutte contre le groupe terroriste né en 2003, a été le thème qui a occupé la campagne électorale nigériane, notamment celle des deux principaux candidats, le sortant Goodluck E. Jonathan et son challenger Muhammad Buhari.
En une douzaine d’années d’existence, le groupe terroriste Boko Haram a accentué ses activités ces dernières années et s’est livré à des exactions contre les populations civiles. On dénombre plus de 15000 civils morts dans les différentes attaques tant dans les zones urbaines et que rurales. Les actions du groupe ont pris un tournant dangereux au cours de l’année 2014, lorsque ses combattants ont réussi à chasser l’armée régulière de certaines de leurs bases, à occuper des villes et villages au point de contrôler une grande partie de ce territoire pour y proclamer un califat islamique.
Toutes ces actions s’accompagnaient des shows du guru de la secte qui, dans un style provocateur et décousu, se livrait à des diatribes, narguait le pouvoir central du Nigeria. L’acte de naissance de ce califat islamique a été signé par le guru de la soit disant »secte islamiste » Abubakar Shekau dans la ville de Ghoza qu’il a en même temps déclarée capitale de son califat d’où il planifiait ses attaques et autres attentats.
Des centaines des milliers, voire des millions des personnes, se trouvent obligées de prendre le chemin de l’exil, fuyant les crimes à grande échelle auxquels se livraient les combattants mus par la soif du sang. L’enlèvement de près de 300 lycéennes dans le village de Chibock en mars 2014 a levé un coin du voile sur l’ampleur de ce groupe qui n’avait plus de limite dans son élan criminel. La série d’enlèvements a commencé depuis des années, mais c’est Chibock qui a véritablement permis un éveil de conscience de la communauté internationale. On estime à près de 10.000 le nombre des femmes et filles kidnappées par ce groupe pour en faire des esclaves sexuelles, domestiques ou candidates aux attaques terroristes, notamment les actions kamikazes dans les grandes villes.
Dans sa folie expansionniste sous-régionale, Boko Haram a tenté de s’exporter au-delà des frontières nigérianes, notamment vers les pays voisins que sont le Cameroun, le Niger et le Tchad, donnant de facto au conflit un caractère international. Des sommets et rencontres de haut niveau sont organisés sur la question de Boko Haram à Paris, à Niamey ou encore à Abuja pour planifier des stratégies de lutte contre ce mal. Finalement, la communauté internationale se décide à prendre à bras le corps ce problème qui menace l’ensemble du Bassin du Lac. A Addis Abeba, l’UA entérine l’idée de la force multinationale mixte pour la lutte contre Boko Haram. Elle comptera, à terme, environ 12.000 hommes venus du Cameroun, du Niger, du Tchad et du Bénin. L’objectif étant d’en finir avec le groupe. Face à l’urgence, le Tchad s’est engagé sans attendre l’acte formel de l’ONU ; il sera suivi du Niger.
Les deux pays engagent des offensives le long des frontières, des offensives victorieuses qui ont permis de libérer la quasi-totalité des localités aux mains de criminels de Boko Haram, réduisant significativement sa capacité de nuisance et offrant à l’armée régulière nigériane la possibilité d’aller sur d’autres fronts pour combattre l’ennemi loin dans son sanctuaire de la forêt de Sambisa. Le nouveau Président Buhari, qui a fait de la lutte contre Boko Haram et l’insécurité, quelques-uns de ses défis à relever, prend la tête d’un pays éprouvé. Mais peut certainement compter sur la détermination de ses voisins pour arriver à bout de ce groupe criminel et redonner vie et espoir à cette zone du nord-est du Nigeria.
Zabeirou Moussa(onep)