Le Président de la République, Chef de l’Etat, SE. Issoufou
Mahamadou, a accordé, le samedi 6 avril dernier, un entretien exclusif à la
Télévision nationale à l’occasion du huitième anniversaire de son accession à
la tête de l’Etat du Niger. Au cours de cet entretien, le Chef de l’Etat a fait
le bilan de la mise en œuvre de son programme de gouvernance dénommé
»Programme de Renaissance du Niger » qu’il met en œuvre depuis le 7 avril
2011, date de son investiture pour son premier mandat, renouvelé par le peuple
Nigérien en mars 2016. Cet entretien à bâtons rompus qui a duré près d’une
heure, a permis au Président Issoufou d’aborder plusieurs questions d’intérêt national,
sous régional et même continental. Le Programme de Renaissance du Niger, sur la
base duquel le peuple nigérien a hissé le Président Issoufou Mahamadou à la
tête du Niger et lui a renouvelé sa confiance a été longuement évoqué. Chiffres
à l’appui, le Président de la République a répondu point par point à toutes ces
questions quelles soientt liées aux infrastructures, aux secteurs sociaux de
base, à la création d’emplois pour les jeunes, à l’agriculture et à l’élevage,
à l’eau et à l’assainissement, à la bonne gouvernance, au processus électoral,
à la monnaie unique, à la Zlecaf et au G5 Sahel. Des questions d’ordre
sécuritaire, politique, économique et social étaient également au coeur de
l’interview. Nous vous proposons l’intégralité de cet entretien sur le bilan de
8 ans d’exercice de pouvoir par SE. Issoufou Mahamadou.
Tout d’abord, que faut-il retenir, en termes de bilan, de la mise en œuvre de
votre Programme de Renaissance du Niger ?
Je voudrais rappeler que c’est en 2011 que le peuple nigérien a eu à me faire
confiance, pour un premier mandat de 5 ans. En 2016, le même peuple nigérien
m’a renouvelé sa confiance. Cela fait donc huit ans que je suis à la tête de
mon pays. Le bilan de ces huit années de mise en œuvre du Programme de
Renaissance est positif. Pendant ces huit ans, le Gouvernement a travaillé sans
relâche à la mise en œuvre des huit priorités dudit Programme.
La Renaissance culturelle, qui est l’une des priorités du programme, vise la
modernisation sociale, la modernisation politique, économique. Le contenu donc
de cette renaissance a été précisé. Ensuite, la sécurité du pays, durant toute
cette période a été assurée, dans un environnement où des organisations
terroristes et criminelles font peser des menaces très fortes sur les Etats. La
stabilité des institutions démocratiques a également été assurée, pendant cette
période. Toujours durant ce temps, nous avons tout fait pour créer les
conditions de stabilité, de développement économique du pays, avec une forte
croissance de notre économie, une maîtrise de l’inflation et de l’endettement
du pays et un effort d’assainissement des finances publiques. Ce qui a permis,
à travers la mobilisation des ressources internes, de réduire le déficit
budgétaire de notre pays, qui sera autour de 3% à l’horizon 2020, conformément
aux critères de convergence de l’UEMOA.
Par ailleurs, le gouvernement a fait beaucoup d’efforts dans le domaine des
infrastructures, qu’elles soient routières, énergétiques, de
télécommunications, mais aussi urbaines. D’autre part, des résultats sans
précédent ont été obtenus sur le plan de l’Initiative 3N, de l’éducation, de la
santé, de l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, de la création
d’emplois pour les jeunes. Donc, je peux dire que le Niger est vraiment en chantier,
et que le Niger se transforme, grâce à la mise en œuvre du Programme de
Renaissance.
Monsieur le Président, la priorité de votre programme c’est justement la
Renaissance culturelle, qui semblait, au départ irréalisable, sachant qu’elle
implique des changements de comportements. Ce qui est un chantier de très
longue haleine. Avez-vous le sentiment que les choses commencent à bouger ?
Oui. La Renaissance culturelle, je le rappelle, vise trois modernisations. La
modernisation sociale, la modernisation politique et la modernisation
économique. Ces trois chantiers visent également à créer les conditions du
renforcement de l’action collective de l’ensemble du peuple nigérien sur le
chemin de son développement économique et social. Il s’agit, en effet d’un chantier
de longue haleine.
Le gouvernement a défini le plan d’actions pour la mise en œuvre et l’exécution
de ce chantier et a aussi mis en place une feuille de route. Il a aussi
identifié les valeurs qu’il faut promouvoir sur le chemin de la Renaissance culturelle,
ainsi que les contre-valeurs qu’il faut combattre.
Le gouvernement a également bien défini les enjeux autour desquels il faut
travailler. Il s’agit par exemple de la transition démographique, la promotion
de la scolarisation de la jeune fille, la lutte contre la mendicité et la
mentalité d’assisté. C’est aussi la lutte pour la salubrité, la protection de
l’environnement, l’unité nationale. Il y a aussi le renforcement, sur le plan
politique, de la capacité de l’Etat à rendre justice, à lutter contre la
corruption, à lever l’impôt, car sans impôt, on ne peut rien faire. Sur le plan
économique, il y a d’autres enjeux sur lesquels nous travaillons, comme le
développement de l’esprit d’entreprise, la promotion du travail.
C’est vraiment un vaste chantier sur lequel un résultat a retenu mon attention.
C’est concernant la transition démographique, la réduction de la fécondité.
Elle est passée de 7, 6 à 6 enfants par femme. Nous sommes, pour ainsi dire,
sur la bonne voie. Le gouvernement continuera à donner les impulsions
nécessaires, afin que ce difficile chantier puisse être mené à bon port.
Monsieur le Président, des populations brandissent, à chacun de vos
déplacements, en région, des fruits et légumes, avec beaucoup de fierté. Par
ailleurs, des expositions sont organisées dans toutes nos grandes villes et
ravissent des prix à des nombreuses foires au plan national. Alors, à deux ans
de la fin de votre second mandat, pensez-vous que l’Initiative 3N a atteint ses
objectifs ?
»Sécheresse ne sera plus synonyme de famine », telle était la promesse que
j’ai faite aux Nigériens. Grâce à la mise en œuvre de l’Initiative 3N, je pense
avoir tenu cette promesse. A travers la mobilisation des eaux,
l’approvisionnement des producteurs en intrants, la défense et la restauration
des terres, nous avons ainsi pu créer les conditions de l’augmentation de la
culture pluviale ainsi que des cultures irriguées. Entre 2011 et 2018, la
production des cultures pluviales a augmenté de 71% et celle des cultures
irriguées a augmenté de 300%. Cela a permis de faire en sorte que sécheresse ne
soit plus synonyme de famine.
En plus, les réalisations que nous avons faites dans le secteur de l’élevage
ont également permis d’augmenter la production de viande et celle du lait. On
note aussi une augmentation de la production halieutique et celle des produits
forestiers non ligneux.
Parallèlement à l’augmentation de la production, le Gouvernement a toujours, et
cela chaque année, conçu et mis en œuvre un plan de soutien, en rapport avec
les partenaires. Ce plan vise à venir en aide aux populations vulnérables, car
même si la campagne agricole a été excédentaire, il y a toujours des villages
qui sont déficitaires, donc des populations qui sont vulnérables. Par
conséquent, chaque année, nous mettons en place ce plan de soutien.
De 2011 à 2018, c’est près de 1.000 milliards FCFA que nous avons investis pour
soutenir les populations vulnérables. Il y a eu des ventes de céréales à prix
modérés, des opérations de distributions gratuites des vivres, du Cash for
Work, du Food for Work, etc. C’est dire que l’Initiative 3N est une combinaison
de réponses structurelles avec des actions d’urgence. Mais au fur et à mesure
qu’on va avancer, dans la mise en œuvre de cette Initiative, les réponses
structurelles vont prendre plus de poids, par rapport aux réponses d’urgence.
Là aussi, nous sommes sur la bonne voie dans la mise en œuvre de cette
Initiative, avec pour nouvelle ambition, »la faim zéro en 2021 ».
Monsieur le Président, vous avez officiellement procédé à la relance des
travaux du barrage de Kandadji, un vœu nourri par les Nigériens depuis les
indépendances. Après toutes ces tentatives infructueuses, avez-vous la
certitude que tous les blocages sont aujourd’hui levés et que ce barrage verra
finalement le jour ?
Plaise à Dieu, cette fois-ci, la relance du projet Kandadji est irréversible.
Je le dis parce que nous avons sélectionné une entreprise pour exécuter les
travaux du chantier, une entreprise dont les capacités techniques et
financières sont avérées. Je le dis aussi parce que je sens que les partenaires
sont à nos côtés pour la réalisation de ce projet structurant pour le Niger.
Ce projet qui a des buts multiples, permettra, entre autre de produire de
l’électricité, de régénérer l’écosystème du fleuve mais aussi de créer les
conditions du développement, non seulement pour la région de Tillabéri, mais
aussi pour l’ensemble du pays. Je pense que cette fois-ci, les choses sont bien
engagées, et la réalisation de ce barrage sera une réalité, dans quelques mois
ou années.
Le volet infrastructures du Programme de Renaissance, continue d’embellir les
chefs-lieux des régions et semble atteindre aujourd’hui sa vitesse de croisière
avec notamment les préparatifs du Sommet de l’Union africaine que notre pays va
accueillir en juillet 2019. Monsieur le Président, quel bilan tirez-vous de ce
programme ?
En ce qui concerne les infrastructures, il faut dire que nous avons eu à
réaliser des routes bitumées, des routes rurales, tandis que d’autres routes
ont été aussi réhabilitées. Nous avons également réalisé des infrastructures
énergétiques, dont la centrale thermique de Gorou Banda et la centrale solaire
de Malbaza.
En matière de télécommunications, nous avons renforcé la fibre optique et mis
en place la TNT. Nous avons par ailleurs développé l’électrification rurale,
modernisé des infrastructures aéroportuaires de villes comme Niamey, Tahoua,
Maradi, Zinder et Agadez. En fait, nous avons modernisé les villes. D’ailleurs,
Niamey, la capitale, avec ses échangeurs, son 3ème pont, ses travaux de
voiries, notamment la voie express, constitue un véritable exemple de cette
modernisation des villes de notre pays. Ici, j’ai quand même un regret de
taille : c’est le blocage, pour des raisons indépendantes de notre volonté du
projet de chemin de fer. Les Nigériens savent effectivement que cela ne dépend
pas de nous. Je ne développerai pas ici les raisons pour lesquelles ce projet
est bloqué.
Donc toutes ces infrastructures que nous sommes en train de réaliser auront
pour effet d’assurer la compétitivité de notre économie en réduisant les coûts
de transport et ceux de l’énergie. En plus, cela va renforcer la compétitivité
de nos villes dans l’accueil des évènements internationaux. Niamey, qui est
aujourd’hui dotée d’infrastructures modernes, accueillera très prochainement le
Sommet de l’Union africaine.
Monsieur le Président, au-delà de la question des infrastructures, ce Sommet de
l’Union africaine considéré comme l’aboutissement de l’offensive diplomatique
que vous avez menée depuis 2011, sera doublé d’un autre sommet qui va consacrer
l’entrée en vigueur de la Zone de libre-échange continentale en Afrique, un
dossier que vous avez personnellement conduit, de bout en bout.
Qu’attendez-vous de vos compatriotes, à l’occasion de ce double évènement ?
Comme je viens de le dire, les infrastructures que nous avons réalisées,
notamment à Niamey, renforcent la compétitivité de nos villes pour accueillir
des évènements internationaux. Aux Sommets de l’Union africaine et de l’OCI,
auxquels vous faites allusion, viendront s’ajouter d’autres rencontres
internationales. Je sais que l’hospitalité est légendaire au niveau de notre
peuple et j’attends des Nigériens qu’ils réservent à nos hôtes l’accueil
chaleureux qu’exige notre tradition.
Monsieur le Président, depuis l’indépendance on parle et reparle de
l’intégration africaine. Est-ce-que, à votre avis la Zlecaf peut impacter et
accélérer ce processus ?
Quand vous lisez le Programme de Renaissance, vous verrez que les objectifs du
programme vont au-delà du cadre de national. Tout le monde connait nos
ambitions en matière d’intégration régionale et continentale. C’est d’ailleurs
pour cela que je me suis très fortement engagé, notamment dans le processus de
la mise en place de la monnaie unique au sein de la CEDEAO. Mais je me suis
aussi engagé dans la mise en place de la Zone de libre-échange continentale
parce que je suis convaincu que c’est la voie de l’avenir pour l’Afrique, et
que les 84.000 kms de frontière qui existent entre les pays africains entravent
le développement de l’Afrique. Il nous faut donc sortir de ces frontières en
mettant résolument en œuvre tous les programmes de l’Agenda 2063 de l’Union
africaine, notamment la Zone de libre-échange continentale, le plan de
développement industriel de l’Afrique qui permettra notamment de transformer
nos matières premières, le plan du développement agricole de l’Afrique et celui
du développement des infrastructures en Afrique. Si on met en place la ZLECAf,
il faut que les pays africains aient des choses à échanger. C’est donc pour
cela qu’il faut promouvoir l’industrie. Il faut également qu’il ait des voies
de communication entre ces pays, d’où la nécessité de prévoir les
infrastructures.
Excellence Monsieur le Président de la République, malgré tous les efforts de
l’Etat et de ses partenaires, l’insécurité continue à sévir à l’est et à
l’ouest de notre pays. Récemment encore la secte Boko Haram a perpétré des
tueries et des enlèvements dans la région de Diffa. On reste toujours sans
nouvelles des femmes enlevées à N’Galéwa. Est-ce qu’on peut parler d’échec sur
ce dossier sécuritaire qui engloutit pourtant une part importante du budget
national ?
Il n’y a pas d’échec. Et ainsi vous m’offrez l’occasion de féliciter et
d’encourager les forces de défense et de sécurité. Je suis fier des résultats
qu’elles ont obtenus dans la lutte contre les organisations terroristes et
criminelles. Nos forces se battent sur beaucoup de fronts depuis la frontière
avec le Burkina Faso, jusqu’à la frontière libyenne, de la frontière avec le
Mali jusqu’au bassin du Lac Tchad.
Notre armée est la 3ème de la CEDEAO, et j’en suis fier. Nous continuerons à
fournir des efforts de recrutement, de formation et aussi d’équipement pour
renforcer les capacités de notre armée. De la même façon que nous continuerons
également la mutualisation des capacités avec les pays voisins, aussi bien au
niveau de la Force mixte multinationale qui se bat contre Boko Haram dans le
bassin du Lac Tchad qu’au niveau de la Force conjointe du G5 Sahel. J’espère
que, très prochainement, il aura une restauration de l’Etat en Libye, ce qui
permettra d’améliorer la sécurité sur l’ensemble de la région, aussi bien au
niveau du Bassin du Lac Tchad qu’au niveau du Sahel.
Monsieur le Président, vous venez de démontrer que la sécurité n’a pas de prix,
comme on a l’habitude de le dire. A cet effet, beaucoup de ressources ont été
affectées par notre pays à ce domaine. Mais, cette option que d’aucuns
qualifient du tout sécuritaire n’a-t-elle pas d’impact sur la prise en charge
des autres secteurs sociaux de base ?
Vous avez raison de le rappeler, la sécurité n’a pas de prix. C’est pour cela
que nous mobilisons toutes les ressources nécessaires pour assurer la paix et
la sécurité sur notre vaste territoire. Il y a des années où la sécurité a
absorbé 19% des ressources budgétaires, comme ce fut le cas en 2018. C’est
pourquoi, nous disons à nos partenaires de tenir compte de cette donne même
pour le calcul du déficit. Il serait bon qu’on calcule le déficit budgétaire en
tenant compte des dépenses de sécurité. Ces dépenses font que, peut-être, nous
investissons moins dans les autres secteurs, comme par exemple l’éducation.
Dans le secteur éducatif, le Programme de Renaissance a prévu d’investir 25%
des ressources budgétaires, actuellement nous n’investissons qu’entre 19 et
22%. Vous remarquez que ça fait 3 à 6 points de moins, que les prévisions dudit
programme.
Dans le secteur de la santé, là il n’y a pas de problème, nous faisons des
investissements qui sont à peu près conformes aux objectifs du programme. Nous
avons prévu d’y investir 10% et, chaque année, nous investissons autour de ce
montant.
Au niveau de l’Initiative 3N, nous avons prévu d’investir 15 % de ressources
budgétaires. Sur ce plan nous en faisons plus. Ceci pour dire qu’en effet, s’il
n’y avait pas les problèmes de sécurité ces dernières années, nous aurions
certainement réalisé plus de routes, plus d’infrastructures énergétiques et
plus d’infrastructures de communication. Mieux, nous aurions plus investi dans
les secteurs de la santé, de l’éducation, de l’emploi, quoique la sécurité
aussi crée aussi des emplois. En effet, nous avons, dans ce domaine procédé à
beaucoup de recrutements au niveau des Forces de défenses et de sécurité
pendant ces 8 dernières années.
Les questions sécuritaires ont apparemment consommé une bonne partie des
ressources financières mobilisées. Qu’en est-il alors des secteurs sociaux de
base ?
Malgré l’importante part de ressources financières qui a été consacrée à la
sécurité, les secteurs sociaux de base ont aussi bénéficié d’investissements.
Avec la grande mobilisation des ressources internes et externes, nous avons pu
investir, en 8 ans, 10.000 milliards FCFA dans la mise en œuvre du Programme de
renaissance. Je disais que dans le seul secteur de l’éducation, entre 19 et 22%
de ces ressources y ont été investis.
Quand on fait le bilan des infrastructures réalisées entre 2011 et 2018, on se
rend compte qu’on a réalisé autant que ce qui a été fait dans ce pays en 50
ans, soit de 1960 à 2010. Durant ces huit ans, nous avons recruté du personnel,
nous avons construit des salles de classe, nous avons imposé la fréquentation
scolaire jusqu’à l’âge de 16 ans.
Le secteur de la santé a aussi bénéficié d’importantes ressources qui tournent
autour de 10% de ces 10.000 milliards FCFA mobilisés et investis dans le cadre
de mise en œuvre du Programme de Renaissance. D’importantes infrastructures ont
également réalisées dans ce domaine. C’est ainsi que des hôpitaux de référence
à Niamey et à Maradi, des centres hospitaliers régionaux ont également été
construits, sans oublier les Centre de santé intégrés. Nous avons également
fourni le pays en médicaments. Je dois rappeler ici que les médicaments, à eux
seuls, représentent 75 % du coût de santé. C’est donc un poste énorme de
consommation de ressources.
Dans le domaine de l’assainissement aussi des efforts ont été réalisés pour
rendre le cadre de vie des Nigériens plus agréable. Nous avons aussi créé
beaucoup d’emplois, car la convergence de tous les efforts que nous déployons
dans ces nombreux secteurs vise à aboutir à la création d’emplois pour les
jeunes. Je constate avec fierté que la jeunesse nigérienne possède beaucoup de
talents et de potentialités. L’occasion nous été plusieurs fois été offerte
pour faire ce constat, notamment à travers des concours comme E-Takara, les
foires et autres expositions. Nous encourageons nos jeunes à poursuivre dans
cet élan talentueux et promoteur pour l’avenir.
Monsieur le Président de la République, au-delà de la sécurité nationale, vous
avez également géré celle de l’ensemble de l’espace sahélien, en assurant la
présidence en exercice du G5-Sahel, une union qui a vu beaucoup de promesses
d’appuis financiers, sans jamais véritablement bénéficier de ces fonds et
pouvoir passer à l’acte. Alors ne pensez-vous pas, vous-mêmes et vos pairs du
Sahel, que la communauté internationale vous a abandonnés à votre sort ?
La présidence nigérienne du G5 Sahel a travaillé sur l’aspect
sécurité-développement. Sur le plan de la sécurité, on peut le dire
aujourd’hui, la Force conjointe est opérationnelle. Sur le plan du
développement, rappelez-vous, nous avons tenu une conférence à Nouakchott, en
Mauritanie, pour mobiliser les ressources financières nécessaires à la mise en
place du Plan d’Investissement Prioritaire du G5 Sahel. Ce Plan a pour objectif
la gouvernance, le développement des infrastructures, celui de la résilience et
la promotion du développement humain dans les zones fragiles, notamment
frontalières entres les pays du G5 Sahel.
Je me félicite du soutien que j’ai obtenu de la part des partenaires pendant
cette présidence nigérienne du G5 Sahel. Je souhaite bien sûr ce que les
partenaires fassent preuve de diligence dans le décaissement des ressources
financières promises, aussi bien au niveau de la sécurité qu’au niveau du
développement.
Monsieur le Président, sous votre conduite, le Niger a joué et continue à jouer
un rôle important dans la lutte contre la migration clandestine. Comment
arrivons-nous à gagner ce combat quand on voit le flux de ces jeunes qui
cherchent, malgré tous les cas de mort enregistrés dans la méditerranée et même
le désert du Sahara, à rejoindre l’Europe ?
Nous menons un combat sans merci contre la migration clandestine pour deux
raisons : une raison morale et une raison sécuritaire. Sur le plan moral, nous
trouvons inacceptable que des milliers de jeunes africains meurent dans le
Sahara et en méditerranée. Sur le plan sécuritaire, comme on le sait, les
trafiquants des migrants sont aussi des trafiquants d’armes. Ils ont donc des
connexions avec les terroristes. C’est donc partant de ces deux raisons que le
gouvernement a conçu un plan de lutte contre la migration clandestine et qu’il
est en train de mettre en œuvre avec succès dans la dimension sécuritaire et dans
celle de développement.
Sur le plan de la dimension développement, la solution au phénomène de la
migration clandestine réside dans la transformation, sur place, de nos matières
premières. Ce qui permettra d’offrir des emplois à notre jeunesse. C’est pour
cela que nous travaillons à mettre en œuvre, à l’échelle de l’Afrique, des
programmes auxquels je faisais tantôt allusion, notamment la Zone de libre
échange continentale africaine (ZLECAf), les Plans de développement industriel,
de développement agricole, celui du développement des infrastructures. Tout
cela aura pour résultats de transformer nos matières premières sur place, de
renforcer les échanges entre nous, de créer davantage d’emplois pour notre
jeunesse. Ma conviction est que l’Afrique va continuer à être un réservoir de
migrants, tant qu’elle restera un simple réservoir de matières premières non
valorisées. C’est pourquoi, il faut tout mettre en œuvre pour transformer sur
place nos matières premières.
Je vous donne pour exemple le cacao. Savez-vous que le cacao représente à peine
5% de la valeur du chocolat ? C’est dire que les pays qui produisent cette
matière première (cacao) n’arrivent à retenir que 5% de la valeur du chocolat.
On peut multiplier les exemples avec des matières premières comme l’uranium, la
bauxite, etc. C’est pourquoi tous les efforts doivent être mobilisés dans les
pays africains afin de transformer nos matières premières. L’Afrique est certes
considérée comme un continent très riche, mais cette richesse n’est pas
synonyme de développement tant que les matières premières ne sont pas
effectivement transformées sur place. C’est à cela que nous allons nous atteler
parce que c’est ça la vraie réponse à la migration clandestine.
Votre 8ème année à la tête de l’Etat est marquée par une ébullition sur le plan
social, avec notamment ce qu’on appelle les Journées d’actions citoyennes (JAC)
et autres contestations de la loi des Finances. Plus récemment les enseignants
chercheurs s’insurgent contre la nomination des recteurs des universités qui
étaient jusqu’ici élus par leurs collègues. Qu’est-ce qui empêche le
gouvernement de ramener la sérénité sur le plan social ?
Je dois rappeler que le gouvernement a toujours privilégié les négociations et
le dialogue dans ses relations avec les partenaires sociaux. S’agissant des
lois des Finances, je dois rappeler que ces lois reflètent les priorités du
Programme de Renaissance. Ces lois ont pour objectif d’améliorer les conditions
de vie des Nigériens. Maintenant, s’il ya des compatriotes qui pensent le
contraire, c’est tout à fait leur droit. Je respecte leurs opinions, mais ces
opinions doivent s’exprimer dans le respect des lois de la République.
S’agissant des Universités publiques, vous n’êtes pas sans savoir que le
gouvernement est à pied d’œuvre pour améliorer la qualité de l’enseignement à
tous les niveaux. Or si je compare la situation du système éducatif de notre
pays avec celle des autres pays de notre sous-région, nous constatons que les
performances de notre système éducatif sont sans rapport avec les ressources
que nous y investissons. Ce qui n’est pas normal. Cela nécessite des réformes
en profondeur et à tous les niveaux y compris au niveau de l’enseignement
supérieur.
Parmi les causes de l’instabilité sociale, on cite les réformes apportées au
système de gestion des finances publiques. Ces réformes étaient-elles
indispensables monsieur le Président, et quelles en sont aujourd’hui les
bienfaits constatés ?
Oui, ces réformes sont indispensables. Elles ont produit des bienfaits pour
notre économie. Elles ont permis de consolider la stabilité macroéconomique et
de soutenir la croissance. Je dois rappeler ici que la croissance de notre
économie pendant les huit dernières années a été autour de 6% et nous prévoyons
une croissance de 7% pour les prochaines années. Mais nous avons aussi, à
travers ces réformes, maîtrisé l’inflation et l’endettement du pays.
De même, nous avons accru les ressources internes et réduit les déficits. Il
fut un moment où nous avions un déficit budgétaire de 9%. En 2018, ce déficit a
été ramené à 4,2%. Et en 2020, le déficit budgétaire du Niger sera conforme aux
critères de l’UEMOA, c’est-à-dire inférieur ou égal à 3%. Ces réformes ont
aussi permis d’accroître la mobilisation des ressources internes.
Alors, quand on tient compte de cette mobilisation des ressources internes et
qu’on y ajoute la mobilisation des ressources externes, on se rendra compte
qu’on a fait du bien à notre pays. Durant ces huit ans, nous avons mobilisé et
dépensé 10.000 milliards de francs CFA. On a dépensé ces ressources pour
assurer notre sécurité, consolider les institutions démocratiques et
républicaines et réaliser des infrastructures routières, énergétiques,
hydrauliques, de communication, etc ; Ces ressources ont été aussi dépensées
pour réussir l’initiative 3N ; promouvoir l’éducation, la santé, l’accès à
l’eau potable pour les populations, et créer des emplois pour les jeunes. Voilà
les bienfaits des lois des Finances et c’est ça la réalité que certains ne
voient pas.
Aujourd’hui, l’économie nigérienne fait partie des 10 premières économies les
plus dynamiques de l’Afrique au sud du Sahara grâce à ces réformes. C’est la
raison pour laquelle ces réformes doivent se poursuivre et se renforcer. Je
dois dire ici que pendant ces huit dernières années, nous avons accru les
revenus par habitant. La richesse par habitant a augmenté et la pauvreté a
reculé.
A titre d’exemple, rien que pour le salaire que paie le gouvernement, la masse
salariale annuelle est passée de 103 milliards en 2010 à plus de 273 milliards
en 2018. Tout ça, révèle les bienfaits des réformes que nous sommes en train de
mettre en œuvre depuis huit ans. Aujourd’hui l’économie nigérienne est sur la
bonne voie.
Pourtant, malgré toutes ces mesures d’austérité mises en œuvre, notre pays est
encore très mal classé dans la dernière publication du Programme des Nations
Unies relativement à d’indice de développement humain (IDH). Faudrait-il encore
plus de sacrifices, Monsieur le Président ?
D’abord, je rectifie : il n’y a pas de mesures d’austérité ! Parce que les
mesures d’austérité, ça veut dire réduire les salaires ; il n’y a pas eu
réduction des salaires, mais plutôt augmentation des salaires. Les mesures
d’austérité impliquent le licenciement des travailleurs de la Fonction
Publique, or on n’a pas licencié des travailleurs, on a plutôt recruté d’autres
nouveaux fonctionnaires. Pendant cette période-là, c’est globalement 50.000
fonctionnaires qu’on a eu à recruter. Donc c’est une fausse idée que de
considérer que les mesures que nous sommes en train de prendre sont des mesures
d’austérité. C’est faux, il n’y a pas de mesures d’austérité, mais plutôt des
mesures qui nous permettront d’atteindre les résultats que je viens de rappeler
tantôt.
Par rapport au classement de l’IDH, il faut retenir cet indice intègre trois
variables : le revenu par habitant, l’espérance de vie, et la scolarisation.
Ceci, pour résumer ce que les gens comprennent, parce que si je rentre dans les
détails de durée moyenne de scolarisation et de durée attendue de scolarisation,
personne ne comprendra rien. Mais il faut retenir que le facteur scolarisation
est un facteur important.
Si on prend le classement du point de vue de la richesse créée, le Niger a un
peu gagné dans le classement. En 2017, les dernières données du FMI classent le
Niger à la 144ème sur 193 pays du point de vue de la richesse par habitant,
devançant ainsi près de 49 pays. Donc ce critère-là classe le Niger en très
bonne position du point de vue de la richesse créée et du PIB. Et j’insiste
là-dessus : nous ne sommes pas le pays le plus pauvre du monde, de ce point de
vue ! Au contraire, nous dépassons 49 pays !
Si nous prenons l’espérance de vie, là également nous sommes loin d’avoir un
mauvais classement. Nous devançons beaucoup de pays de la sous-région. Mais le
problème du Niger vient de la scolarisation. Et là je ne vais pas accabler la
colonisation, mais je vais rappeler qu’à l’indépendance, le taux de
scolarisation était de 3%. Je ne vais pas accabler les régimes qui nous ont
précédés, mais chacun a fait ce qu’il a pu pour améliorer cette scolarisation
qui nous tire vers le bas. Nous aussi, depuis que nous sommes en place à partir
de 2011, nous nous battons pour améliorer le taux de scolarisation, en
particulier pour améliorer le taux d’alphabétisation.
Quels que soient les efforts que nous faisons pour scolariser les jeunes
nigériens, il y a la tranche d’âge de 15-25 ans qui nous tire vers le bas.
Voilà la signification de ce classement. Je sais que les Nigériens sont très
frustrés chaque année lorsqu’on annonce le mauvais classement du Niger. Il faut
nuancer les choses, il faut relativiser et se dire qu’il faut s’engager très
fortement dans le combat de l’amélioration de la scolarisation, de
l’amélioration de l’alphabétisation des adultes tout en attirant l’attention de
l’opinion sur la nécessité de promouvoir la scolarisation de la jeune fille et
l’alphabétisation des femmes.
C’est un secteur par rapport auquel nous sommes vraiment en retard. C’est
heureux de constater que le gouvernement ait décidé comme vous le savez de
réglementer la protection de la scolarisation de la jeune fille. Tout cela
participe à l’amélioration de l’indice de développement humain.
Monsieur le Président de la République, l’économie de notre pays paie l’effet
de la baisse des prix de notre principal produit d’exportation qu’est l’uranium
jusqu’à une certaine époque et de la chute des cours du pétrole également. Or,
d’importants projets comme Imouraren et le pipeline pour l’exploitation du brut
restent tributaires des coûts de ce produit sur le marche mondial. Est-ce qu’on
peut espérer une embellie à plus ou moins court terme sur le paysage économique
durement éprouvé par tous ces effets conjugués ?
L’économie du Niger a connu plusieurs chocs : la baisse des prix des matières
premières, les chocs climatique et sécuritaire et ceux lié à la récession
économique chez notre grand voisin, le Nigeria. Mais malgré ces chocs, notre
économie fait preuve d’une grande résilience. J’ai rappelé le taux de
croissance pendant ces huit dernières années qui tournait en moyenne autour de
6% par an.
Notre économie a été certes résiliente, mais s’il n’y avait pas eu ces chocs
là, on aurait eu encore une croissance plus grande. S’il n’y avait pas la chute
des prix des matières premières ; s’il n’y avait pas eu l’effondrement de la
demande sur le marché de l’uranium, on aurait ouvert Imouraren. Et cela aurait
renforcé la croissance de notre pays. S’il n’y avait pas eu l’effondrement des
cours du pétrole, on assignerait peut être l’augmentation de la production du
pétrole au Niger. Mais cela fait partie des perspectives en ce qui concerne le
pétrole.
Ces perspectives sont bonnes pour le Niger. C’est justement pourquoi nous avons
des prévisions de taux de croissance autour 7% pour les cinq (5) prochaines
années. De ce point de vue, le Niger a un bel avenir devant lui malgré les
chocs auxquels vous venez de faire allusion.
Monsieur le Président de la République, on sait que le secteur privé joue un
rôle essentiel dans le développement économique de tout pays. Qu’est-ce que le
gouvernement nigérien fait pour que le secteur privé nigérien contribue
davantage au développement économique de notre pays ?
Quatre (4) facteurs sont à la base de la richesse dans un pays. Il s’agit en
l’occurrence de la croissance effective, des investissements publics, des
investissements privés et des exportations. Mais c’est les importations qui
interviennent de manière négative dans la détermination du Produit Intérieur
Brut (PIB). Donc, si nous devons accroitre le PIB et augmenter la croissance de
notre économie, nous devrons agir sur les facteurs positifs. Et parmi ces
facteurs positifs, il y a incontestablement les investissements privés. C’est
pour cela que le gouvernement a fait du secteur privé un des moteurs de la
croissance économique. En effet, dans le Plan de Développement Economique et
Social (PDES), qui a d’ailleurs fait l’objet de la Table-ronde de Paris, il y a
quelques mois de cela, nous prévoyions de mobiliser 10 milliards de dollars en
provenance du secteur privé sur les 23 milliards de dollars espérés. C’est pour
dire l’importance que nous accordons au secteur privé. Dans cette optique, nous
faisons beaucoup d’efforts en matière d’amélioration du climat des affaires. Le
Niger est considéré comme un des pays les plus réformateurs en Afrique
Subsaharienne. Nous faisons beaucoup d’efforts pour améliorer certains
indicateurs comme la création d’entreprises, la délivrance des permis de
construire, le raccordement à l’électricité, l’obtention des prêts, la célérité
dans les procédures d’exécution des contrats etc. L’objectif de notre pays est
d’être parmi le top 50 d’ici 2021 en matière du climat des affaires. Et tout
cela, pour faciliter l’intervention du secteur privé national, mais également
du secteur privé étranger. Notre objectif est d’attirer au maximum les
investissements directs étrangers dans le pays.
Pour aborder maintenant les questions d’ordre politique, vous avez promis, M.
Le Président, d’organiser des élections propres et de remettre le flambeau à un
président démocratiquement élu. A ce sujet, la CENI a déjà entamé les
consultations pour l’enrôlement des Nigériens et la confection du fichier
électoral biométrique. Malheureusement, cette institution est en train de
travailler en l’absence de l’opposition. Est-ce que dans ces conditions la
crédibilité des élections sans l’implication totale de tous les acteurs, de
l’opposition notamment, n’entacherait-elle pas la crédibilité du processus
électoral?
S’agissant de l’organisation des élections, nous sommes tenus par le délai
constitutionnel. Nous avons ces contraintes dont l’opposition doit tenir compte
et s’impliquer dans le processus électoral. Je rappelle que l’une des priorités
du Programme de la Renaissance, c’est de consolider les institutions
démocratiques et républicaines. La légitimité est une des conditions de la
vitalité et de la force des institutions. Je tiens à ce qu’en 2021, des
élections libres, transparentes, impliquant tous les partis, soient organisées.
J’encourage la CENI à poursuivre sa mission et j’invite l’opposition à
s’impliquer dans le processus électoral.
Comme on le sait, les élections générales coûtent excessivement chères. Et là
elles vont intervenir dans un contexte où notre pays consacre comme vous l’avez
dit, d’énormes ressources pour assurer sa sécurité et l’intégrité de son
territoire. Avons-nous, Monsieur le Président, les moyens de supporter les
charges liées à ces consultations générales ?
Vous avez raison de me dire que les élections coûtent chères. D’ailleurs, la
démocratie coûte chère. Mais l’absence de la démocratie coûte encore plus
chère. C’est pour cela que nous sommes engagés, déterminés à organiser ces
élections quel que soit le coût. Et mon rêve est que le 2 Avril 2021, je puisse
passer le relai à un président démocratiquement élu par le peuple nigérien.
Dans le même ordre d’idée le CNDP a pris d’importantes décisions toujours à
l’absence d’un nouveau regroupement des formations politiques qui se réclament
de l’opposition radicale. Est-ce que ce n’est un autre facteur qui peut
décrédibiliser le processus électoral ?
C’est pour cela que je vous dis que nous avons des contraintes
constitutionnelles. Ces contraintes sont là, je dois partir le 2 Avril 2021.
Tous les acteurs doivent comprendre cela. Et tous les acteurs doivent se
mobiliser afin que ces contraintes constitutionnelles soient respectées. En
tout cas, de mon côté je ferai tout pour qu’il n’ait pas de retard dans
l’organisation des élections. Et le gouvernement mobilisera tous les moyens
pour que les élections puissent se tenir pour que le 2 Avril comme je l’ai dit,
je puisse passer le relai à un Président démocratiquement élu. Ça sera une
première dans l’histoire du Niger. Et le jour où je le ferai, je serai l’homme
le plus heureux.
Parlant toujours du processus électoral, votre parti politique, le PNDS
Tarayya, a connu sa première grande crise interne lors de la désignation de
votre dauphin. Ce pour quoi vous avez vigoureusement écarté du gouvernement un
de vos fidèles compagnons. Est-ce que ce problème est, aujourd’hui,
définitivement réglé ?
D’abord il n’y a pas eu de crise au sein du PNDS, il y a eu des débats comme
cela est normal dans tout parti politique qui se respecte. Je voudrais rappeler
ici, et comme je l’ai dit tout à l’heure, un des objectifs du Programme de la
Renaissance, c’est la modernisation politique. La modernisation politique veut
dire quoi ? En effet, cette modernisation consiste à concevoir et à pratiquer
la politique comme une science pour la conquête, l’organisation et l’exercice
du pouvoir politique autour des valeurs démocratiques et républicaines. Et
c’est ce que fait le PNDS durant plus d’un quart de siècle. Ainsi, le PNDS veut
montrer la voie de la modernisation. Je voudrais rappeler ici que le PNDS est
le parti qui a eu à faire l’alternance à sa tête sans crise. En 2011, quand
j’ai été élu Président de la République, le camarade Bazoum a été désigné
président du parti à l’unanimité, mieux, à 100% par les structures du parti
sans aucune crise. Pourquoi ce résultat ? C’est parce que le PNDS a été créé
autour d’un certain nombre de valeurs. Le PNDS montre la voie de ce que nous
pouvons appeler comme étant la modernisation politique. On peut se féliciter de
cela. Il n’y a pas de crise au niveau du PNDS. Vous avez vu comment s’est passé
d’ailleurs le dernier congrès du parti ? Congrès à l’issue duquel le candidat
du PNDS a été investi à 100% des voix des structures du parti ! C’est carrément
un plébiscite !
Pourtant, Monsieur le Président, certains analystes ne croient pas en la
sincérité de cette désignation de M. Bazoum comme étant le prochain candidat du
PNDS aux prochaines élections ; certains prédisent une volte-face de votre
part. Est-ce que M. Bazoum est définitivement et sincèrement l’unique dauphin
du Président Issoufou Mahamadou ?
Ecoutez, je comprends parfaitement leur scepticisme à ce sujet.
Pourquoi ?
Parce qu’il y a eu tellement de promesses trahies en politique, aussi bien sous
nos tropiques qu’ailleurs dans le monde. Il y a eu tellement d’engagements
non-tenus, dans ce domaine-là, que ce soit au Niger ou ailleurs en Afrique. Eh
bien, c’est normal que les gens soient sceptiques. Mais je voudrais rassurer
mes compatriotes en proie à ce scepticisme. En effet, nous avons des
convictions, nous faisons la politique autour d’un certain nombre de principes
pour lesquels nous nous sommes toujours battus afin d’asseoir et de raffermir
les bases de notre parti.
Notre ultime combat, comme je l’ai déjà dit, c’est de moderniser la vie
politique au Niger, de détribaliser la politique et les pratiques politiques.
Aussi, pour cela, il faut qu’on donne l’exemple. Et donc je rassure ceux qui
doutent, et dont je comprends le doute, que ce choix qui a été fait par le
congrès du PNDS est ir-ré-ver-sible, ir-ré-vo-cable !
Monsieur le Président de la République, sur ce même chapitre, certains
analystes estiment que la désignation de M. Bazoum est plus ou moins précoce,
et qu’il s’agit d’une manœuvre pour couper l’herbe sous les pieds de certains
alliés de la MRN et de l’APR. Est-ce que vous avez une réponse à ces
allégations ?
Le PNDS n’a aucun intérêt à le faire. Je crois que les relations entre les
partis de la MRN sont excellentes. Le PNDS n’est pas le seul parti de la
Mouvance à avoir désigné son candidat pour l’élection présidentielle de 2021 ;
il y a d’autres partis qui ont fait la même chose. Donc je ne pense pas qu’il y
ait des problèmes à ce niveau.
Toujours sur ce chapitre de la politique, votre challenger du deuxième tour de
l’élection présidentielle 2016, M. Hama Amadou, est toujours à l’extérieur pour
éviter une peine prononcée à son encontre par la justice, dans une affaire que
lui et ses partisans qualifient plutôt de politique. Est-ce que M. Hama Amadou
peut espérer rentrer, un jour, au bercail et prendre éventuellement part aux
futures joutes politiques ?
Ecoutez, je crois que vous savez qu’il y a une séparation des pouvoirs au Niger
qui est bien réelle. Donc, il ne m’appartient pas de répondre à une telle
question. C’est une question qu’il faudrait poser au juge. C’est à la Justice
de répondre à votre question.
Monsieur le Président de la République, est-ce que vous restez confiant quant à
l’organisation d’élections libres et pacifiques en 2021, et surtout la
perpétuation d’un climat politique et social apaisé ?
Oui absolument ! Inch’Allah, des élections libres, transparentes et inclusives
seront organisées en 2021 dans notre pays. Je suis animé de la ferme volonté
politique pour que cela se réalise dans notre pays. Je viens de l’affirmer à
maintes reprises. Nous avons aussi une expertise avérée en matière électorale.
Par conséquent, toutes les conditions sont réunies pour que ces élections
soient organisées dans la transparence.
Enfin, une dernière question Monsieur le Président. Après huit ans de conduite
des destinées du Niger, et au vu des nombreuses réalisations à votre actif,
est-ce que vous avez le sentiment du devoir accompli aujourd’hui ?
Franchement, j’ai, au tout début de cet entretien, fait le bilan de la mise en
œuvre du Programme de la Renaissance en ses actes I et II. Ce qui ressort de ce
bilan, c’est que les engagements qui ont été pris auprès des électeurs ont été
honorés. Les promesses ont été tenues. Donc j’ai vraiment le sentiment du
devoir accompli.
Mais, ceci étant dit, je n’ai guère la prétention d’avoir réglé tous les
problèmes du Niger. Comme vous le savez, le Niger revenait de loin, tout était
à reconstruire, et on s’était attelé du mieux qu’on le pouvait pour faire le
maximum. Du reste, on n’a jamais promis de régler tous les problèmes du Niger.
Le processus de construction d’une nation est long. Nous avons posé notre
pierre, comme d’autres l’ont fait avant nous, et comme d’autres le feront après
nous. A la postérité d’en juger !
(Script réalisé par l’ONEP)
(08/04/2019)