Entretien
Le Canard Déchaîné : Bonjour. Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Rakia:
Je me nomme Laminou Kader Rakia. Je suis une jeune économiste de formation. Après la maitrise, j’ai choisi de suivre ma passion en me spécialisant en Réalisation Documentaire de Création d’où mon 2nd titre de jeune réalisatrice.
Vous venez de réaliser un film intitulé ‘’Les silences du couteau’’ De quoi parle ce film et comment a-t-il été accueilli par le public ?
« Les silences du couteau » est un film documentaire de 15mn qui relate la vie d’une artiste de renommée internationale, la plus belle voix du sahel en la personne de Fati Mariko. Le film dénonce une pratique traditionnelle qui, contrairement à ce que pensent certains, porte atteinte à l’intégrité physique et moral des petites filles sur qui elle est pratiquée. Il s’agit de la mutilation génitale féminine dont est victime notre grande vedette de la musique moderne nigérienne. Fati s’est enfin décidé de briser la loi du silence en dévoilant à travers ce film, son petit secret de femme excisée dans le but d’interpeler la conscience de nos parents. Le film a été chaudement applaudi par le public venu nombreux lors du lancement le 8 novembre dernier au Palais des congrès, parce qu’aucune âme sensible ne pourra rester indifférente face au témoignage émouvant de Fati.
C’est la première fois que vous vous essayez dans le domaine du cinéma, notamment le film documentaire? Si oui qu’est-ce qui vous a motivé à le faire ?
J’ai déjà réalisé 2 petits films documentaires. Mais celui-ci, je le vis en moi comme si j’en suis aussi victime. La 1ère fois que j’ai écouté l’histoire de Fati, je n’ai pas pu retenir mes larmes. Etant réalisatrice et féministe à la foi, c’étais un devoir pour moi de faire passé à l’image ce cris de cœur d’une mère qui cherche le moyen de sauver la vie des petites innocentes, et le cinéma est là pour ça.
Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées au cours de la réalisation de ce film ?
Toute production est accompagnée d’une série des difficultés que ce soit pendant le tournage, le montage ou à la sortie du film. Mais comme l’a toujours dit mon patron, les difficultés ne subsistent que là où existe la réussite. Cette expression m’a fait voir que le côté positif des choses. Raison pour la quelle on n’a rencontré aucune difficulté qui aurait affectée la réussite de cette réalisation.
Juste après la projection du film au Palais des Congrès, vous vous êtes rendue en Côte d’Ivoire avec Fati Mariko, l’actrice principale du film. Pouvons-nous savoir pourquoi ?
Le film a été retenu par le FESTILAG (Festival du film des Lagunes) à Abidjan pour une projection grand public suivie d’échanges. Aussi il a été projeté à Grand Bassam lors d’une table en commémoration de la marche des femmes sur cette ville coloniale.
Vous travaillez depuis quelque temps à Animas Sutura, une ONG qui œuvre beaucoup pour le mieux-être des populations à travers la sensibilisation et la lutte contre les maux qui minent notre société. Que comptez-vous y apporter comme contributions à ce que fait cette ONG ?
Vous l’avez bien dit ; Animas œuvre pour le bien être de la population et c’est dans cette lancée qu’ils nous ont soutenues, Fati et moi pour la réalisation de ce film. C’est avec une grande fierté que je parle de Animas-Sutura grâce à qui je suis en train de mieux me former dans le domaine de la production. Je participe déjà à plusieurs productions audio des matériels IEC de la boite et souhaite plus tard y participer davantage à travers des productions vidéo à savoir les films.
Avez-vous d’autres projets dans le domaine du cinéma ? Si oui, lesquels ?
L’idée de film sur la quelle je vais travailler prochainement porte sur la question de mariage précoce. J’ai horreur de voir des petites filles arrachées de leur band d’école pour avoir été promise à un parent ou un proche. Pendant le tournage au village de Djagoga (Torodi), j’ai fait la connaissance d’une jeune fille de 15ans qui voulait fuguer de chez son mari pour aller poursuivre ses études en ville. En effet, elle a été donnée en mariage par ses parents, juste après l’obtention de son CFEPD il y’à moins de 2 ans alors qu’elle préférait s’inscrire au collège comme toutes les autres filles de son âge. Hélas, son rêve a été anéanti et ça, sans même énumérer tous les risques auxquels elle est exposée à travers ce mariage précoce.
Interview réalisée par ISAM