Il est temps de déclarer certaines zones de la région de Niamey inondables, non constructibles, non habitables et les affecter aux activités de production agro-pastorale et aux activités sportives.

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M. Balla Illotchi Mahaman Salissou, Directeur de l’urbanisme au ministère de l’urbanisme et du logement

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La forte pression démographique qui s’exerce sur les principales villes du Niger et le renforcement du pouvoir d’achat de la classe moyenne, a poussé les habitants des centres urbains à investir de plus en plus dans l’acquisition de biens immobiliers pour procurer un toit à leurs familles. Malheureusement, cette course effrénée, surtout dans la capitale Niamey, a permis le développement, quelques fois illégal, de plusieurs quartiers avant même l’obtention de l’ensemble des documents qui permettent de déclasser un terrain vague et de l’affecter à l’habitation. Dans cet entretien qu’il nous a accordé, le Directeur de l’urbanisme au ministère de l’urbanisme et du logement, M. Balla Illotchi Mahaman Salissou, revient sur l’utilisation abusive de ces espaces non constructibles et sur la restructuration des quartiers spontanés. Il se prononce également en faveur du classement de certaines zones de Niamey comme « zones inondables et non-constructibles ».

M. le Directeur, comment se fait la restructuration des quartiers spontanés, particulièrement ceux qui se trouvent dans des zones à risque tels que les flancs raides de collines et les zones de stagnation d’eau ?

L’objectif principal de la restructuration est l’amélioration des conditions de vie des populations du site à restructurer en particulier et celle de la population entière de la ville concernée. Généralement, le quartier, le village urbain où la situation de base a des conséquences sur les équipements et infrastructures existantes de la ville du fait de la pression exercée sur ceux-ci par cette partie de la ville où ils sont quasi inexistants.

La restructuration consiste dans un quartier dit précaire, sous équipé, spontané ou dans un village englouti par un centre urbain, un village administratif quelconque en milieu urbain ou rural,  à l’ouverture des voies d’une part

pour le besoins de la circulation et de desserte des habitations en eau potable, en électricité,  en ouvrages d’assainissement et d’autre part pour la création des équipements sociaux de base ou socio-collectifs tels que les écoles, les centres de santé, les terrains des sports et de loisirs, les places publiques et cultuelles.

Cependant, la restructuration peut être entreprise dans des quartiers lotis habités ou non, où le lotisseur n’as pas respecté les normes urbanistiques en l’occurrence l’harmonie et la hiérarchie des voies, les terrains pour les équipements et infrastructures socio-collectifs, ou dont le lotissement n’a pas respecté les dispositions d’un document de planification urbaine en vigueur.

Les zones à risque tels que le flanc raide des collines et les zones inondables sont classées zones non habitables et non constructibles. C’est dire qu’il n’y a pas de restructuration sur une zone considérée non habitable. La seule opération possible c’est de déplacer cette population et la réinstaller sur un site approprié. 

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans la restructuration de ces genres de quartiers ?

Entre autres difficultés que nous rencontrons dans ces genres d’opérations, on peut noter l’identification des sites de recasement et son acceptation par les impactés, les frais exorbitants pour l’acquisition des sites de recasement, les transactions foncières après le rapport du commissaire enquêteur, la poursuite de mise en valeur des terrains par les impactés, l’indemnisation juste et préalable des impactés, les coûts liés à l’aménagement du site de recasement et l’insertion socioéconomique de cette nouvelle population dans son nouveau environnement. 

Quels sont vos conseils à l’endroit des propriétaires coutumiers qui morcellent et vendent illégalement ces types de terrains et aussi des clients qui achètent ces terrains relativement abordables pour y habiter ?

Le conseil que je peux donner aux propriétaires coutumiers est de les rassurer que le droit coutumier au Niger est reconnu et  confirmé en 1960 et 1961. Cependant, ce droit se limite là ou commence le droit de l’urbanisme. C’est dire que la reconnaissance de droit, ne donne pas droit à l’aménagement ou au morcellement des propriétés foncières aux fins d’habitations. Dans une ville, l’occupation des sols ou la destination des sols est réglementée par des outils de planification urbaine, aujourd’hui, institué par la loi 2017 -20 du 12 avril 2017 fixant les principes fondamentaux de l’urbanisme et de l’aménagement urbain.

C’est dire que la transaction sur une propriété foncière dans ces zones n’est pas interdite mais c’est la destination des sols qui est règlementée. Est-ce que votre terrain est situé de par l’outil de planification urbaine dans une zone d’habitat, de commerce, d’industrie, d’artisanat, d’agriculture urbaine ou dans une zone inondable, interdite de construction, non habitable.

Pour vous acquéreur, renseignez-vous sur la destination du sol de la propriété que vous vouliez acquérir. Par exemple, vous n’aurez pas d’acte de cession moins encore de permis de construire pour habitat dans une zone classée inondable, non constructible. Achetez vos parcelles sur des sites régulièrement lotis, après avoir vous-même visiter le terrain.

Peut-on dire, Monsieur le directeur de l’urbanisme, qu’il est temps de déclarer certains quartiers de Niamey « zones inondables » ?

Ma préoccupation c’est surtout les inondations dans la ville de Niamey. Il vous souviendra que quand le 8 septembre 2020, le niveau du fleuve a atteint 695 centimètres, plusieurs digues ont cédé et de vastes parties des quartiers de la rive droite ont été inondées. En dehors de Niamey, d’autres communes le long du fleuve Niger ont été inondées et gravement touchées. Les derniers chiffres de la période indiquaient 329 958 personnes touchées, 65 personnes mortes, plus de 31 960 maisons endommagées ou détruites, 5 768 hectares de terres agricoles inondés. C’est dire qu’il est temps de déclarer certaines zones de la région de Niamey inondables, non constructibles, non habitables et les affecter aux activités de production agro-pastorale et aux activités sportives.

A mon avis, la population devrait faire sienne cette préoccupation tant pour son caractère préventif mais également pour transformer ce défi en opportunité de développement, source de création d’emploi et de promotion des petites et moyennes entreprises.

Par Souleymane Yahaya (Onep)

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